Amnesty International a rendu public le 13 Avril dernier, le rapport sur le Droit à la justice et la lutte contre l’impunité au Mali. Intitulé « Des crimes sans coupables. Analyse de la réponse judiciaire aux crimes liés au conflit dans le centre », ce rapport de 70 pages, rend compte du cadre juridique qui empêche la manifestation de la vérité et qui porte atteinte aux Droits Humains. En effet, les procès expéditifs, les juridictions en compétition et la compétence problématique de la justice militaire face aux crimes commis par les militaires sur les civils restent monnaies courantes selon ledit rapport. Ainsi, ce cadre légal imparfait et la loi d’amnistie votée en 2015 dans le sillage de l’accord de paix, continuent de porter entorse à la manifestation de la vérité. Par ailleurs, d’autres obstacles jalonnent le chemin vers la vérité et la réparation des préjudices créés aux victimes et aux familles.Entre outre, il y a absence de protection tant pour les témoins que pour les acteurs de la justice. << Comment voulez-vous que je mène des enquêtes alors que je ne peux même pas aller vers les sites de crimes sans une escorte des militaires? Comment voulez-vous que j’enquête sur les incidents pour lesquels les FAMAs sont accusées alors que ma sécurité dépend de leur bon vouloir? >> évoque un magistrat basé au centre du Mali. À cette absence de protection s’ajoute le mauvais traitement et la torture des détenus, mais surtout l’interdiction à la Commission des Droits de l’Homme du Mali qui a pourtant mandat légal d’avoir accès en tout temps à tous les lieux de détention/privations de liberté du Mali à se rendre dans les lieux de détention de la direction générale de la sécurité de l’État. Faut-il le rappeler, plusieurs groupes armés tels que Dan na Ambassagou ont commis des attaques délibérées contre des villages entiers, avec des massacres observés à Koulogon-Peul (39 personnes tuées en janvier 2019), Ogossagou, (157 personnes tuées en mars 2019 et 35 en février 2020), à Sobane-Da (35 personnes tuées en juin 2019) et les agents des forces armées maliennes (FAMAs) ont été responsables d’homicides illégaux et d’exécutions extrajudiciaires notamment à Dioura (17 personnes en février 2018), à Nantaka (25 personnes tuées en juin 2018), à Massabougou (9 personnes tuées en juin 2020), à Binédama et Yangassadiou (respectivement 37 et 15 personnes tuées en juin 2020). Aussi, les forces armées françaises font l’objet de demandes d’enquête sur de possibles violations du droit international humanitaire s’agissant du bombardement d’une cérémonie de mariage à Bounti, en janvier 2021, au cours de laquelle 19 civils et 3 membres présumés de groupes armés ont été tués.
Samuel HOUNDJO